Quelle est notre Foi ? Une relation quotidienne avec le Père, dans l’Esprit de Jésus-Christ

Publié le par Garrigues et Sentiers

J’ai beaucoup aimé Où est-il ton Dieu ?, l’article de Jacques Musset qui essaye de rendre compte de notre foi. Le fait de se sentir très proches de nombre de contemporains qui ne la partagent pas nous interroge sur sa réalité, l’éclairage que donne cet article est le bienvenu. Mais en même temps il laisse un goût d’inachevé. Il s’agit d’une foi dans un Esprit, mais est-ce la foi chrétienne ? Il balaye les scories, mais quelle relation avec cet Esprit ?

Dans son article Qui est ton Dieu ? Un Dieu qui croit en l’homme, en chaque homme, Pierre Locher apporte une réponse. La foi chrétienne est le fruit d’une histoire, de récits, de mythes. On ne peut pas les occulter. Il est évident que cette histoire et ces récits, mythiques, historiques ou encore simplement romanesques, n’ont pas à être soumis à la critique de la science, ils sont d’un autre ordre. La critique de Jacques Musset est un refus de les prendre au premier degré, ce qui a été le cas au cours des siècles. Mais on ne peut pas les balayer car ils disent quelque chose d’essentiel sur Dieu, sur l’homme, sur la relation de l’homme avec Dieu (ce qui me semble l’essentiel).

Reste la question du sacrifice que balaye aussi Pierre Locher. Sujet difficile s’il en est, mais qu’on ne peut pas non plus occulter tant il est présent tout au long du premier Testament et repris dans le second. On peut discuter pour savoir si l’Eucharistie est un sacrifice, si la Cène était un repas pascal ou non. Il n’en reste pas moins que les évangélistes et saint Paul ont évoqué la notion de sacrifice. Ils l’ont fait avec la culture, les représentations de leur temps, on ne peut pas prendre à la lettre leurs affirmations, mais on ne peut pas non plus les supprimer. 

Le sacrifice d’expiation qui consisterait à payer Dieu pour qu’il nous pardonne n’est pas recevable, et depuis longtemps le premier Testament l’avait récusé. Rappelons le psaume 51, 18-19, au sujet du sacrifice d’expiation :  « Car tu ne prends aucun plaisir au sacrifice, un holocauste, tu n’en veux pas. Le sacrifice à Dieu, c’est un esprit brisé, d’un cœur brisé, broyé, Dieu, tu n’as point de mépris. » Ou encore en Si 35, 3 : « Ce qui plaît au Seigneur, c’est qu’on se détourne du mal, c’est offrir un sacrifice expiatoire que de fuir l’injustice. »

Reste le Serviteur, chez Isaïe, qui s’offre lui-même, qui se substitue aux pécheurs et en porte le poids des conséquences. En Mc 10, 45 Jésus s’y réfère explicitement en reprenant les termes d’Isaïe 53 quand Il évoque sa Passion. Les références au sang de l’Alliance, à l’agneau sacrifié, montrent que le sacrifice est bien présent dans l’événement de la Croix. Nous ne pouvons accepter ce qui serait un marchandage avec Dieu pour obtenir grâce à ses yeux, ni que le Père réclamerait la souffrance de son Fils (ou de nous aussi) pour pardonner les péchés. À nous de purifier la notion de sacrifice qui n’est pas, comme dans le langage courant, une souffrance qu’on s’impose pour plaire à Dieu, mais un don total de Jésus à son Père, « quoi qu’il en coûte » pour reprendre une formule à la mode. Ce n’est pas la même chose.

Le don des prémisses du premier Testament, le sacrifice de l’agneau, c’est-à-dire le don de la vie (qui est dans le sang), sont le signe de notre volonté de servir Dieu en premier, et alors le signe de notre alliance avec Lui. Le repas de la Cène est le partage du Corps du Christ (nous sommes ce Corps) et de sa vie (son sang, sang de l’Alliance) dans ce mouvement de don total qu’Il fait de lui-même à son Père et le mène à la Croix. Il me semble que là réside le vrai sacrifice, bien éloigné du sens qu’on donne d’ordinaire à ce terme.

Peut-être faut-il faire un pas de plus sur notre chemin. Jacques Musset nous propose une vision de Dieu épurée, Pierre Locher en rend compte en reprenant les récits fondateurs, il manque encore l’évocation de notre relation avec le Père. À qui nous adressons-nous, et par qui, dans notre prière ? Notre foi chrétienne ne se limite pas à la connaissance de Dieu et de sa relation avec les hommes de l’Ancien Testament, ne se limite pas à l’adhésion à l’événement de la Croix, elle débouche sur notre relation quotidienne avec le Père, dans l’Esprit de Jésus-Christ. 


Marc Durand

Publié dans Réflexions en chemin

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