À l'écoute de la Parole de Dieu

Publié le par Garrigues et Sentiers

Pentecôte Célébration de l'Esprit

Ac 2, 1-11 ; Ps103 ; Ga15, 16-25 ; Jn15, 26-27 16, 12-15

 

Trine est notre Dieu : Père, Fils, Esprit. Longtemps, le catholicisme, circonscrit dans son exigeant christo-centrisme, a un peu négligé la troisième personne de la Trinité. Les charismatiques l’ont mis en visibilité ; il faut dépasser le spectaculaire et aller au cœur du «mystère».


L’Esprit est originel dans la création : «Au commencement,…la terre était informe et vide… et l’Esprit de Dieu planait sur les eaux» (Gn 1, 1-2). «Il est souffle de vie de la vie de toute créature», disait Hildegarde de Bingen (XIIe S.). Et au 6e jour, «le Seigneur Dieu modela lhomme avec la poussière tirée du sol ; il insuffla dans ses narines le souffle de vie, et lhomme devint un être vivant.» (Gn 2,7). Sans l’Esprit, nous ne sommes qu’«ossements desséchés» (Ez 37, 15). Cette vie fragile ne tient qu’à un souffle : «Tu reprends leur souffle, ils expirent et retournent à leur poussière. Tu envoies ton souffle : ils sont créés …» (Ps 103, 29-30).

 

Seuls devant Dieu, nous sommes démunis, soit bavards pour dire et redire nos manques et nos besoins, soit muets, mus par une fausse «crainte de Dieu», dont on ne sait pas très bien le sens, mais qui risque d’en exagérer la distance. C’est alors qu’intervient l’Esprit Saint. Lien entre les personnes divines, il l’est aussi entre Dieu et les hommes : il « vient au secours de notre faiblesse […] L’Esprit lui-même intercède pour nous par des gémissements inexprimables … » (Rom 8,26).

A propos de notre faiblesse dans la solitude ressentie «face à» Dieu, il n’est pas anodin de remarquer que, lorsque l’Esprit se manifeste à nous, c’est souvent dans le cadre d’une communauté. Par exemple : lors de l’apparition de Jésus aux apôtres «enfermés par peur des Juifs» : «il souffla sur eux et il leur dit : Recevez lEsprit Saint’» (Jn 20, 19-23) ; au jour de la Pentecôte, les dits apôtres « se trouvaient réunis tous ensemble» (Ac 2, 1) ; Pierre dans la maison du centurion Corneille, dont toute la famille s’est retrouvé baptisée après l’effusion de l’Esprit-Saint sur elle (Ac 10, 47) … La vie en Dieu n’est pas (seulement) une aventure individuelle, elle passe par un salut solidaire de l’humanité. Une «Église (véritablement) universelle» aurait pu, aurait dû être cette communauté.

 

On retrouve l’importance de celle-ci à travers la question des langues exposée dans les textes liturgiques de Pentecôte.

La première lecture prévue à la messe de la vigile raconte le mythe de Babel (Gn 11, 1-9). Un langage commun facilitait les relations entre les hommes, il consacrait l’unité de l’humanité, et pouvait faciliter l’expression d’un amour mutuel. Les hommes en ont fait l’instrument d’un dessein orgueilleux : construire ensemble une tour pour « monter» aux cieux défier leur créateur et tenter d’accéder à la divinité. C’est un un peu la répétition du péché d’Adam, mangeant le fruit qui pouvait le rendre «comme Dieu» (Gn 3,5). «Bab=el», qui se voulait «porte de Dieu», est devenue pour les Juifs, après la dispersion de ses bâtisseurs, manifestation de la toute puissance de l’Éternel. On pourrait trouver sa réaction un peu mesquine. En multipliant les langues, il punissait ceux qui avaient voulu l’égaler et rejeter leur «dépendance» à son égard, alors qu’elle aurait pu être simple reconnaissance de sa grandeur.

Le polyglottisme rendait impossible la communication spontanée entre les hommes, donc une éventuelle mutuelle compréhension et un instrument de solidarité. En même temps, on peut considérer que Dieu a donné aux hommes une chance d’avoir une autre l’ambition qu’une vaine rivalité avec lui, et qu’il y a sur terre suffisamment à faire pour ne pas se perdre dans un projet «nébuleux».

Pentecôte est l’anti-Babel. Les Juifs pieux présents à Jérusalem pour les fêtes de Chavouot (don de la Torah) venaient de divers pays énumérés au chapitre 2 des Actes, correspondant à peu près au monde sinon connu, du moins habituellement fréquenté. «Dans la stupéfaction et l’émerveillement, ils disaient : "Ces gens qui parlent ne sont-ils pas tous galiléens ? Comment se fait-il que chacun de nous les entende dans son propre dialecte,sa langue maternelle ?"  

Que nous soit donnée, à nous aussi, la capacité d’entendre, de comprendre et d’expérimenter la Parole de Dieu non seulement en notre langue, mais surtout en notre vie. Viens, Esprit Saint, esprit de joie et de paix. Le monde a grand besoin de toi !

 

Marcel Bernos

PS. : Lit-on encore la séquence «Viens Esprit Saint en nos cœurs…» présente dans la liturgie de Pentecôte ? Cette prière, très poétique, permet, d’approcher quelques attributs reconnus de l’Esprit : consolateur, lumière…

 

 

 

Pour être informé des derniers articles, inscrivez vous :
Commenter cet article