À l'écoute de la Parole de Dieu
3eme Dimanche du Temps Ordinaire Année B
Jn 3, 1-5.10 ; Ps 24 ; 1 Co 7, 29-31 ; Mc 1, 14-20
«Que ta volonté soit faite» répétons-nous quotidiennement, peut-être sans y prêter suffisamment attention. Mais comment le Seigneur nous fait-il savoir sa volonté ? Souvent, quand il s’agit d’un peuple, par la voix d’un prophète. Notons que celui-ci ne s’auto-proclame pas. Au contraire, il résiste parfois à la mission que Dieu lui confie. La liturgie de ce jour nous montre Jonas aller à Ninive pour annoncer la destruction de la ville. Mais l’on sait à quel point il a d’abord trainé les pieds, il a fallu que Yahweh envoie une tempête pour l’amener à exécuter sa mission (Jonas 1,4 et 3,1). Mais il n’a pas été le seul à renâcler devant une tâche difficile, voire dangereuse. On se souvient de Jérémie, prétextant son incapacité à parler (Jérémie 1,6), d’Ézéchiel, que Yahvé doit rassurer et «mettre debout» , (Éz 2,1-2 et 3,22), du découragement d’Élie harcelé par la reine Jézabel, «activiste» de Baal (I Rois 19,2-4). Prophète était un emploi dangereux en Israël, où l’on avait tendance à les brimer (pensons à la fuite d’Élie), voire à les tuer (Mt 23,37).
Mais le Seigneur peut aussi «inspirer» directement son fidèle. Dans le psaume 24, le fidèle, faisant appel à la bonté originelle de Dieu, sollicite son enseignement salvateur et une juste «direction de conscience», demande confiante fréquente dans les psaumes. Pour être totalement disponible à Dieu, pour «être libre de tout souci» (I Cor, 7, 32), il faudrait atteindre un état de «non-vouloir» auquel appellent non seulement saint Paul, mais de nombreux mystiques. « Il est nécessaire de nous rendre indifférents à l'égard de tous les objets créés, en tout ce qui est laissé au choix de notre libre arbitre et ne lui est pas défendu ; en sorte que, de notre côté, nous ne voulions pas plus la santé que la maladie, les richesses que la pauvreté, l'honneur que le mépris, une longue vie qu'une vie courte, et ainsi de tout le reste…» (Ignace de Loyola, Exercices spirituels, § 23). Au fond, il faudrait atteindre une sorte d’«apathie positive» en ceci qu’elle doit laisser le sujet totalement disponible à la volonté divine. Vincent de Paul, par exemple, la conseillait à Louise de Marillac, co-fondatrice des Filles de la Charité, de nature scrupuleuse et toujours inquiète : «Tâchez à vivre contente parmi vos sujets de mécontentement et honorez toujours le non-faire (sic) et l'état inconnu du Fils de Dieu».
Mais pour vivre selon la loi de Dieu, le temps presse. Aussi bien Paul (I Co 7,29-31) que Marc (Mc 1,14-20) s’expriment dans la perspective d’une parousie imminente : «Le règne de Dieu est tout proche». Peu importe que des siècles soient passés depuis cette annonce, le temps reste toujours limité pour chacun d’entre nous : «nul ne sait l’heure, pas même le Fils» (Mt 24,36). Que faisons nous de ce sursis ? Sommes-nous prêts, comme Simon, André, Jacques et Jean à tout lâcher pour suivre «aussitôt» Jésus Christ, sans autre assurance que son appel, impératif, sans même savoir pour quoi faire, sinon répondre à une invitation sibylline : «devenir pécheur d’hommes» ?
Marcel Bernos