À l'écoute de la parole de Dieu
5e dimanche ordinaire 9 février 2020
Is 58, 7-10 ; Ps 111, 4-5, 6-7, 8a.9 ;
1 Co 2, 1-5 ; Mt 5, 13-16
Les textes de ce jour peuvent se lire comme centrés sur le thème du partage en faveur de ceux qui manquent de l’essentiel pour nourrir leur vie quotidienne, matérielle ou spirituelle. Pour Isaïe, c’est le partage avec le pauvre qui « justifie » l’homme, c’est le partage qui fait que ce juste « ne tombera jamais ». Et le psaume 111 ne dit pas autre chose. C’est le partage, enfin, qui authentifie les actes de ceux qui prétendent annoncer la « Bonne Nouvelle ».
Quel argument fera que les hommes recevront comme vraie la Lumière que les disciples auront allumée et placée en évidence ? « Voyant ce que vous faites de bien, ils rendront gloire à votre Père qui est aux cieux » (Mt 5,16). C’était un peu la méthode traditionnelle qu’ont suivie de nombreux missionnaires à travers le monde, en particulier aux XIXe et au début du XXe siècles. Avant de « faire le catéchisme », ils ouvraient des dispensaires et des écoles. On critique parfois, aujourd’hui, ce paternalisme, qui avait, il est vrai, quelques fois l’ambiguïté d’arriver dans le train de la colonisation. Le risque ne doit pas faire abandonner l’élan. « L’apostolat et l’évangélisation ne sont pas des conquêtes, mais des témoignages de vie ; des prédications par l’attitude, des exemples de dévouement, et non des techniques de conversion » (Henri Dumery « La tentation de faire du bien », dans Esprit, janvier 1955).
Après tout, on rejoint ici la démonstration, si souvent citée, de l’épître de saint Jacques (2,15-18) « Si un frère ou une sœur sont nus et manquent de la nourriture de chaque jour, et que l'un de vous leur dise : « Partez en paix, mettez-vous au chaud et rassasiez-vous» sans pourvoir à leurs besoins physiques, à quoi cela sert-il ? Il en va de même pour la foi : si elle ne produit pas d'œuvres, elle est morte en elle-même. Mais quelqu'un dira : « Toi, tu as la foi, et moi, j'ai les œuvres.» Montre-moi ta foi sans les œuvres, et moi, c'est par mes œuvres que je te montrerai ma foi ».
Un peu à part dans cette série, Paul ne parle pas directement des actions de celui qui veut être apôtre et annoncer le mystère de Dieu. Il affirme qu’un témoignage sur Jésus-Christ, en tous cas le sien, ne saurait être un discours rationnel, agencé, construit selon les normes de la rhétorique (recommandation que bien des théologiens ont oubliée), mais l’annonce d’un messie crucifié, c’est à dire exposant non la magnificence et la gloire, mais l’humilité et la faiblesse de Dieu. Ce refus de recourir à une sagesse humaine, très bien représentée chez les philosophies et dans les religions païennes, on le retrouve chez beaucoup de témoins plus mystiques que rhéteurs. Pensons à Bernadette Soubirous transmettant le message de la Vierge à Massabielle : « Je ne suis pas chargée de vous le faire croire, je suis chargée de vous le dire » (Carnets de notes intimes, 1873).
Proclamer ce que l’on croit être la vérité sans faiblesse et sans doute, mais sans suffisance ni contrainte et, en même temps, à travers un comportement fraternel, ne serait-ce pas la règle d’or d’une pastorale efficace, que l’on a parfois oubliée à travers l’histoire.
Albert Olivier