" Et vous, qui dites-vous que Je suis ? " : la réponse de Danielle Nizieux
Qui est Jésus pour moi ?
Jésus est amour : les Évangiles sont pleins de ces histoires d’amour. Jésus n’est pas venu pour condamner ; il est venu pour les brebis perdues, et il en est mort. Mais ce n’est pas un juge et il n’est pas revanchard. Son mode d’emploi comme homme et comme Dieu., c’est de pardonner et de sauver. Jésus, pour moi, c’est le père-mère de l’enfant prodigue. Celui qui dit « Va » quand son fils veut partir... comme Dieu à Abraham autrefois, pour qu’il s’accomplisse ; et celui qui dit « Reviens », lorsque le fils rentre accablé dans le giron familial – et ce, sans punition, parce que l’amour ne punit pas mais qu’il accueille. Mieux encore, aimer Dieu, c’est aimer son prochain ; faire l’œuvre de Dieu, c’est aimer et aider son prochain : cette confusion d’amour entre Dieu et le prochain explique et justifie, s’il en est besoin, la création. Dieu ne se sépare pas de sa créature. Comme un père-mère, de son enfant. J’ajoute que sa mort n’est pas celle d’un guerrier vaincu, mais d’un homme affaibli par le poids du péché des hommes, qui manifeste par sa non-puissance que la seule vraie loi est celle de l’amour incommensurable.
Jésus est liberté : l’homme est au centre du monde créé par Dieu. La loi n’est pas faite pour le contraindre mais pour le libérer. Quand Jésus dit qu’il est venu pour accomplir, c’est bien pour donner non la pénitence mais le salut, la vie en communion avec Dieu. (le shabbat…). C’est la foi qui sauve, on le répète tout au long des Évangiles. L’homme de foi est donc responsable de lui, et des autres ; à lui de comprendre la parole que jésus dieu délivre. Plus besoin aujourd’hui de la sécurité d’une vérité unique et intangible, plus besoin d’une morale infantilisante. Jésus me demande de risquer ma vie à sa vérité, sans tabou, mais en inventant tous les jours le visage de son amour : à qui dois-je tendre la main, moi, fidèle du Christ aujourd’hui ? Vers qui le pontifex maximus, François, et chacun d’entre nous tous, pontifex minus, devons-nous lancer des ponts pour les accueillir comme des frères dans notre communauté ?
Jésus est moderne : c’est un homme–dieu qui parce qu’il est de tous les temps est d’aujourd’hui, de ce temps. Parce que nous continuons à préparer le Royaume, et que nous le faisons avec les techniques et les connaissances d’aujourd’hui, les modes de vie d’aujourd’hui. Donc, il me parle aujourd’hui et son message est vivant. Je n’ai pas peur de la modernité, je n’ai pas peur de demain : voici ce que Jésus qui « fait toutes choses nouvelles » m’apprend tous les jours.
Surtout, Jésus Dieu, c’est pour moi l’homme du dialogue avec la Samaritaine, dialogue qui résume tout : il s’adresse à une exclue par sa religion, une exclue par son sexe, une exclue par son mode de vie. Et c’est à elle qu’il dit : « Un jour viendra où on n’adorera plus sur la montagne de Samarie ni dans le temple de Jérusalem, mais en esprit, et en vérité : si tu savais le don de Dieu… »
Oui, Jésus me fait à ce moment, et à chacun d’entre nous, baptisé, confirmé et doté comme tel de ce que les savants appellent le sensus fidei, le sens de la foi, de la fidélité, Jésus nous fait là prêtre, prophète et roi. L’homme est à l’image de Dieu, et comme Irénée de Lyon, nous disons que Jésus en se faisant homme, nous donne du divin. Le lieu du sacré, ce n’est plus la montagne ou le temple, c’est l’homme.
Non pas que pour moi, la tradition ne soit pas nécessaire : elle l’est parce qu’elle fait communier ensemble le peuple de Dieu, à la fois avec son passé (encore faut-il que les rituels soient compris et pour qu’ils soient compris, qu’ils soient expliqués) mais surtout dans l’avenir : la messe par exemple se termine par : « Ite , missa est » ; non pas : « La messe est finie, rentrons chez nous ! » mais : « Allez, en route ! »
Voilà. Jésus, je l’aime, ce Jésus des Évangiles. Il m’a mise debout et en marche et je ne suis pas près de me rasseoir.
Danielle Nizieux