Contre l'homéo-phobie
L’actuel débat sur l’homéopathie, ou plutôt son lynchage médiatique, ne laisse pas d’être inquiétant quant à la méthode de combat de ses adversaires. Se voulant définitives, les grandes voix péremptoires de « spécialistes » médicaux patentés tiennent les propos les plus cinglants, les philippiques les plus acrimonieuses pour nuire à une pratique médicale ancienne, durable, peu dangereuse, peu onéreuse, et qui convient à l’usage de millions de patients en France (et à l’étranger).
Il y a au moins quelque chose de vrai dans les arguments des fossoyeurs de l’homéopathie : on ne comprend pas comment ça marche. Les principes reconnus de la science académique semblent ne pas réussir à s’appliquer pour expliquer pourquoi et comment une quantité infinitésimale (voire une quasi absence) de substance peut produire un effet thérapeutique à l’encontre de ce que la même substance provoque lorsqu’elle est en « quantité suffisante » pour avoir un effet. L’homéopathie, à ce stade, n’est pas « scientifique ».
Est-elle pour autant «inefficace» comme on l’en accuse, lui laissant comme seul mode opératoire celui d’un effet placebo ? C’est trop vite dit, ou alors, il faut prendre les utilisateurs de ces remèdes pour de naïfs gogos ou de fieffés imbéciles, car s’ils y ont recours, c’est qu’ils en attendent un résultat, et ils ne l’attendraient pas s’ils ne remarquaient qu’ils en obtiennent. “ Vous pouvez tromper quelques personnes tout le temps. Vous pouvez tromper tout le monde un certain temps. Mais vous ne pouvez tromper tout le monde tout le temps ” (attribué à Abraham Lincoln). Or l’escroquerie ou l’illusion, s’il y avait escroquerie ou illusion, dure depuis plus de deux siècles ! Et quand bien même ce serait un effet placebo, s’il profite au bien du malade, faut-il y renoncer au nom de la seule rationalité ?
Qu’il faille de la prudence dans son emploi – comme pour la pharmacopée classique d’ailleurs – c’est une évidence. Il y a des charlatans partout. Mais il y a eu de la malhonnêteté à avancer, comme cas à charge, un cancer du sein qui, traité par l’homéopathie seule, aurait bien sûr mal fini. Jamais un véritable homéopathe (docteur en médecine, tout de même !) ne soignerait un cancer uniquement par l’homéopathie ; tout au plus prescrirait-il un traitement de confort, un « accompagnement » pour atténuer les effets désagréables des traitements ordinaires (radiothérapie, chimiothérapie …). Un des vulgarisateurs les plus connus en France dans cette discipline, Alain Horvilleur, précise bien, à l’article « Cancer » de son Guide familial de l’homéopathie (p. 55) :« Le traitement du cancer est malheureusement hors de portéede la médecine homéopathique / Toutefois, quelques médicaments homéopathiques bien choisis peuvent procurer un certain confortau malade ». De même, le diabète(p. 90) « n’est pas du domaine de l’homéopathie… ».La notion d’accompagnement, très nette dans ces cas, se retrouvera pour un certain nombre d’affections, où l’homéopathie n’intervient que pour pallier des troubles annexes à l’affection principale pour laquelle on renvoie à la médecine classique, telles l’insuffisance cardiaque ou la névrose.
D’expérience, on peut constater que l’homéopathie n’agit pas sur tout, ni sur tous, ni constamment. Elle permet des traitements « de fond » liés à l’idiosyncrasie du malade, ce que l’allopathie ne fait pas toujours. En outre, et au moins, elle facilite grandement le quotidien pour beaucoup de petits maux qui gâchent la vie et obligent à des consultations, et elle allège l’emploi de traitements chimiques jamais anodins. Ce peut être des coliques, des irritations rhinopharyngées, les rhumes, des coups (des allopathes des Services d’urgences recourent à Arnica montana pour éviter les hématomes), etc.
Quant à la nocivité des produits homéopathiques, elle peut se révéler dans le cas où le patient ne tolère absolument pas le lactose ou le saccharose. Certes ! Mais globalement, elle recèle infiniment moins de risques que bien des médicaments allopathiques. Avez-vous eu le courage de lire certaines notices de médicaments « classiques » ? Je sais bien qu’il s’agit surtout d’ouvrir les parapluies des laboratoires en cas d’accidents médicamenteux. Tel médicament (Oh ! cela ne concerne qu’1 patient sur 100, ou 1 sur 1000, voire moins) peut provoquer depuis de banales céphalées ou vomissements jusqu’à un diabète, une dépression, une hémiparésie, une péricardite… Tel autre annonce honnêtement un « risque de réactions toxiques sévères voire fatales (sic) ».
Reste le coût des remboursements, puisque finalement c’est à cela qu’on voulait parvenir et qu’on est parvenu. Les remboursements de l’homéopathie représentaient, en 2016, moins de 0,4 % des comptes « médicaments » de l'Assurance Maladie. Il faut, en outre, rappeler qu’ils sont peu chers et peuvent, parfois, remplacer des médicaments plus coûteux.
Alors pourquoi cette hargne ? De mauvais esprit y voient la main de « Big-Pharma » ! Certes, le complotisme est aujourd’hui une des maladies de l’information. Mais qui niera que, dans tous les domaines (on connait les pressions de grands consortiums internationaux jusque dans les institutions européennes), un lobbing effréné qui défend leurs intérêts avant ceux des citoyens, ici des malades.
Mais n’y aurait-il pas aussi un regain de « scientisme » : on ne comprend pas, donc ça n’existe pas. On pourrait répondre : ça existe, donc il reste à comprendre, non à nier.
Marc Delîle