Vouloir décanoniser Jean-Paul II : un inutile trait d’humour ?

Publié le par Garrigues et Sentiers

Croyant avoir mal compris la tribune de Christine Pedotti et Anne Soupa, Décanonisez-le !, je l’ai relue. Tout ce qu’elles écrivent à propos de « LA femme » telle qu’elle est vue par la (pas si) « sainte » Église, j’y souscris, d’autant plus que j’ai un peu travaillé ces questions et que ce n’est, malheureusement, pas un scoop.

 

Elles sont des intellectuelles de haut-vol, qui ont fait et continuent à faire beaucoup pour la « cause » des femmes dans l’Église, et donc pour dépoussiérer la dite-Église. Elles ont un fort poids médiatique, entre autres avec la fondation de la Conférence catholique des baptisé-e-s francophones (CCBF). N’oublions pas tout ce que Pietro de Paoli, le pseudo utilisé par Christine Pedotti, a suscité comme saines réactions au milieu de la somnolence bien-pensante des catholiques post-Vatican II.

 

Mais est-il pertinent de se laisser aller à ce qui apparaît à certains comme de l’humour, comme une gaminerie ? Certes, Jean-Paul II reste par bien des côtés controversable. On s’aperçoit de plus en plus à quel point, pris par le grand large, il a négligé la réforme interne de l’institution dont le public découvre les dramatiques «abus», sans doute connus depuis longtemps. Mais vouloir « décanoniser » un pape, pour conclure un article qui pose tant de questions graves ! N’est-ce pas distraire l’attention et donner une importance exagérée à une procédure de glorification interne propre à la boutique ?

 

Ou alors, il faut faire, parallèlement, un article sur la pertinence de canoniser à tout va, laissant à Dieu – ce qui serait poli  – le choix de reconnaître les siens. Il est vrai que cette procédure appliquée de plus en plus systématiquement à nos « souverains pontifes », comme si c’était leur médaille du travail, perd un peu de sens. Jadis, on nous proposait seulement des modèles à imiter (sera-ce le cas avec le bienheureux Pie IX s’il accède au stade final du « mode d’emploi » ?). Dans une perspective « œcuménique », ne pourrait-on inventer une reconnaissance de sainteté, qui ne serait pas réservée à l‘Église catholique apostolique et romaine, mais à tous ceux qui, au nom de Dieu, ont œuvré à son service et celui de leurs frères : tels Gandhi, Martin Luther King ou le Mohamed qui sauva la vie de Christian de Chergé, abbé de Tibhirine, au prix de la sienne…

 

Si la « décanonisation » de Jean-Paul II n'était qu'une boutade piégée, eh bien ! je suis tombé dans le piège, mais j’ose penser que je ne serai pas le seul et que cela ne sert pas la parole vigoureuse pour une juste cause que les auteures défendent depuis longtemps, et que j’approuve.

                  

                  Marcel Bernos

Publié dans Réflexions en chemin

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