Conjurer les "peurs" de la société française
L’assemblée d’automne de la Conférence des évêques de France s’est ouverte mardi 3 novembre à Lourdes, par le discours de son président, Mgr Georges Pontier. Devant les évêques, hier, il a insisté sur la vision d’une « Église qui se fait d’abord mère ».
Développant de nombreux thèmes chers au pape François, l’archevêque de Marseille s’est dit attaché à une Église qui se tient auprès de toutes les familles et manifeste sa miséricorde à l’égard des migrants.
Accueil des migrants, attention portée à toutes les familles, protection du climat, engagement pour la paix et la fraternité mais aussi développement de la collégialité entre les évêques…
Mardi 3 novembre, en ouverture de l’Assemblée plénière des évêques de France, réunie à Lourdes jusqu’à dimanche, le discours de son président, Mgr Georges Pontier, a résonné d’accents bergogliens indéniables. L’archevêque de Marseille a développé tous les thèmes chers au pape François qui sont autant d’axes prioritaires pour l’Église de France.
Conjurer les peurs
Celle-ci est clairement à l’unisson du pape, a-t-il semblé vouloir rappeler, alors que le Vatican est affecté par une crise interne. Elle veut aussi conjurer les peurs de toutes sortes qui traversent la société française, quelques semaines avant les élections régionales des 6 et 13 décembre, et dix-huit mois avant la prochaine échéance présidentielle. « Le mot ‘‘peur’’ revient à cinq reprises dans ce discours », ne manquait pas de remarquer Mgr Hervé Giraud, archevêque de Sens-Auxerre et prélat de la Mission de France. Ce dernier précise d’ailleurs que les évêques se sont interrogés dès l’ouverture de la séance consacrée mardi matin aux thèmes d’actualité, sur la question de leurs interventions dans la campagne électorale.
L’efficacité de telles déclarations s’est posée, alors que le Front national, qui a fait souvent l’objet de vives condamnations de la part de l’Église depuis trente ans, pourrait remporter une ou deux régions.
Selon plusieurs évêques, la participation de Marion Maréchal-Le Pen, députée Front National du Vaucluse, à l’université d’été de la Sainte-Baume, fin août, à l’invitation du diocèse de Toulon, devait forcément être évoquée dans les discussions. L’émotion qu’elle a suscitée dans une partie de l’épiscopat témoigne de la fragilité de la collégialité dans cette instance.
Conférence épiscopale et synodalité
À mots choisis, Mgr Pontier a adressé un message à ses pairs à ce sujet, les invitant à réfléchir à son fonctionnement à la lumière des propos du pape, le 17 octobre, pour les 50 ans de l’institution du synode. La conférence épiscopale doit-elle prendre plus de responsabilités ? Mgr Pontier a préféré mettre l’accent dans son discours sur « une conscience commune » que les évêques doivent encore mieux forger, analyse Mgr Jean-Luc Brunin, évêque du Havre. « Une Église synodale est une Église de l’écoute, avec la conscience qu’écouter est plus qu’entendre. C’est une écoute réciproque dans laquelle chacun a quelque chose à apprendre », a rappelé Mgr Pontier, citant encore Jorge Bergoglio.
Sur la même ligne que le pape, le président de la CEF a estimé que les évêques français étaient encore à « mi-chemin », dans l’accomplissement d’une pleine synodalité. C’est sans doute aussi pour progresser sur cette voie que Mgr Pontier leur a proposé de faire de nouveau une retraite ensemble, comme ce fut le cas au printemps, lors de la précédente assemblée.
Miséricorde à l’égard des migrants
Manifestement heureux de l’expérience qu’il a vécue au cours du Synode sur la famille, l’archevêque de Marseille a largement insisté sur la vision d’une « Église qui se fait d’abord mère », telle qu’elle se dégage du rapport final des pères synodaux. « Oui, l’Église choisit la tendresse et la miséricorde de la mère pour accompagner ses enfants sur un chemin de progression, de conversion, de discernement de la présence de l’Esprit à l’œuvre en tout cœur pour y accomplir son œuvre de salut et de bonheur », a martelé Mgr Pontier.
Sa miséricorde, l’Église doit aussi la manifester à l’égard des migrants, a-t-il insisté dans l’un des passages les plus forts d’un discours qui évoquait celui du pape à Lampedusa. Le cardinal Francesco Montenegro, archevêque du diocèse d’Agrigente où se situe l’île tristement célèbre, viendra justement, demain, parler aux évêques français.
Bruno Bouvet, à Lourdes
Extrait de lacroix.com du 3/11/15
Vous pouvez accéder au texte du discours de Mgr Pontier en cliquant ICI