Comment le programme Erasmus peut devenir un facteur de paix pour l’Europe

Publié le par Garrigues et Sentiers

Erasmus est le nom donné à un programme d'échange d'étudiants entre des universités européennes partenaires.

De sa création en 1987 jusqu'en 2013 près de trois millions d'étudiants en ont bénéficié.

Deux de mes petites filles en font partie. Je leur ai demandé de nous apporter leurs témoignages en essayant d'établir une relation entre la paix à promouvoir dans la construction européenne et ce qu'elles ont vécu lors de ces échanges.

C'est tout d'abord Agnès, 31 ans, qui évoque ses souvenirs.
En 4ème année de mes études à l’École d'architecture de Marseille-Luminy, j'avais alors 21 ans, j'ai effectué du 15 septembre 2004 au 15 juillet 2005 un échange dans le cadre des mobilités d’Études Erasmus.

Parmi les établissements partenaires de mon école j'ai choisi l’École technique supérieure d'architecture de Valencia en Espagne.

Mon établissement d'origine n'ayant pas de contact avec la cité universitaire du campus je me suis logée chez l'habitant.

Cela m'a aidé à retrouver des repères assez rapidement ce qui est nécessaire lorsqu'on se retrouve seule à l'étranger. Je me suis insérée dans le tissu urbain grâce  à de nombreux contacts avec la population espagnole qui vit beaucoup dehors et sait s'approprier les espaces publics qui deviennent des lieux de rencontres et d'échanges.

Ce rapport particulier avec la ville m'a permis d'étudier l'architecture de Valencia où des patrimoines réhabilités comme la Lonja (l'ancienne Bourse du Commerce) cohabitent avec des bâtiments contemporains comme le Musée des Sciences œuvre de l'architecte Santiago Calatrava.

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en haut : La lonja et le musée des sciences
ci-dessus : La lonja - Salle des colonnes

La réutilisation de l’emplacement d'un fleuve asséché pour en faire un parc et des espaces verts a été également une reconversion réussie.
Savoir intégrer un riche passé dans des structures nouvelles peut nous aider à construire l'Europe des peuples.
La découverte de l'Université Polytechnique de Valencia a été également enrichissante. Ce campus regroupe différentes écoles créant ainsi un espace d'échanges.
Il est également un véritable quartier où l'on trouve tous les commerces ainsi que des terrains de sport.
Au centre de cet ensemble on peut se promener dans un parc où sont disposées sculptures et installations.Cette conception de campus facilite les rencontres entre étudiants de nationalités différentes.

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La fête annuelle de la paella rassemble toutes les écoles et concrétise cette fraternité.
En ce qui concerne les cours qui nous sont donnés nous avons une grande liberté de choix. Rien ne nous est imposé.
J'ai pu valider un certain nombre de crédits dans l'enseignement de l'architecture mais également dans d'autres écoles comme le Design ou les Beaux-Arts.
Cette possibilité renforce les occasions d'échanges. Cela nous donne également une vision plus transversale et ouverte de notre métier qui doit être avant tout pluridisciplinaire et non sectorisé entre l'architecte et l'ingénieur.
A souligner que nous avions le choix de suivre les cours le matin ou l'après-midi.
Cette possibilité permet, surtout aux étudiants espagnols qui paient leurs études, d'occuper un emploi salarié par demi-journée. Les cours constituent un regroupement important de nationalités allant de l'Europe à l'Amérique du Sud.

On peut voir ci-dessous la photo de la salle de l'atelier d'architecture où j'ai travaillé mon projet de fin de stage. Nous devions réaliser un équipement public pour la ville de Gandia. J’ai souhaité réaliser un Centre social permettant l’accueil des jeunes et des anciens, favorisant ainsi les rencontres et l’échange. C’est pourquoi il comprend ateliers, bibliothèque, salles de réunion et d’exposition ce qui permet de créer ce lien social. 
 
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La salle de cours 

Voilà 10 ans que j'ai vécu cet échange. Il m'en est resté une attention à l'autre s'enrichissant de nos différences, mais aussi la volonté d'aller vers l'autre avec indulgence en acceptant ses contradictions et des motifs de désaccord.
J'ai mieux appris le sens du travail en équipe avec des gens d'autres nationalités.
Le regroupement de nos complémentarités entraîne une synergie nous permettant d'atteindre ensemble un but commun.
Il est plus difficile quand on n'a pas vécu de telles expériences de dépasser ses habitudes et ses traditions et cela dans tous les domaines.
J'ai conscience d'avoir été privilégiée.

Nejma, 23 ans, vient quant à elle de terminer son séjour Erasmus à Milan du 4 mars 2014  au 11 juillet 2014, dans le cadre de ses études à l’École Centrale de Nantes. Elle nous raconte son expérience.

Un étudiant centralien doit faire un séjour d’au moins seize semaines à l’étranger. Deux options s’offrent à lui : un semestre Erasmus dans une université partenaire ou un stage dans une entreprise basée à l’étranger. Étant en préparation d’un diplôme ingénieur - architecte j’ai choisi Milan car nous avons des accords nous permettant d’effectuer un semestre à temps plein en faculté d’architecture.

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Arrivées à Milan avec une camarade de l’École, nous avons pu trouver un logement proche du campus grâce à une association européenne tenue par des étudiants. Un professeur désigné comme tuteur par le service administratif de la faculté nous a fait visiter le campus et les locaux des cours. Par la suite il s’est tenu à notre disposition pour s’assurer que « nous nous sentions bien » dans l’établissement d’accueil.
Les cours étaient donnés en italien ou en anglais. Ayant choisi cette dernière langue je me suis retrouvée avec un grand nombre d’étudiants d’Europe. Mais il y avait également, venant au titre d’un programme d’échange différent, des étudiants d’autres pays du monde comme la Chine, Israël, la Moldavie, la Russie, la Tunisie, la Turquie.

L’enseignement était adapté à cette grande diversité de nationalités et de cultures. C’est ainsi que nous avons étudié l’histoire contemporaine de l’architecture en balayant les principales œuvres d’Europe.
Milan va recevoir l’exposition universelle en 2015. C’est pourquoi nous avons eu à remettre chacun un projet imaginant le pavillon d’un des pays participants.

Tout cela a été une occasion de partage et d’échange.

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Mais ce sont également les sorties et les soirées que nous avons organisées qui ont favorisé la spontanéité de ces échanges.

Nous nous sommes retrouvés alors dans un groupe d’une quinzaine d’étudiants représentant dix nationalités différentes. On avait envie d’en apprendre plus sur le pays de l’autre et de comparer en toute liberté nos coutumes, nos habitudes. J’ai réalisé que la France renvoyait à travers le monde une image positive. Notre pays fait rêver. On nous demandait souvent de parler français avec mon amie pour entendre la sonorité apaisante de notre langue.

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Ce séjour a bien été pour nous une occasion exceptionnelle de rencontre et de dialogue entre des représentants de peuples différents.

Pour conclure je ne peux que citer les récents articles de Bernard Ginisty concernant l’Europe sur notre blog qui répondent à ce qu'ont évoqué ces témoignages.

« Les gouvernements successifs de notre pays n’ont pas fait l’effort suffisant pour développer une pédagogie et un art de vivre ensemble européen, et Bruxelles a servi trop souvent de repoussoir et de prétexte pour camoufler la pauvreté de certaines politiques hexagonales. » (L’Europe pour les citoyens, mais sans eux ? – Mai 2014 l.7 à 10).
« Il faut penser l’Europe non pas comme un système de frontières à franchir et à rendre plus ou moins perméables, mais en termes de foyers de rayonnement qui se chevauchent les uns les autres » (Les citoyens européens condamnés à inventer. Mai 2014 l.34 à 37).
Erasmus répond bien à ces exigences car il est « trans-frontière » et devient alors un facteur de paix.
On ne peut qu'inviter les visiteurs de notre site à raconter à leur tour ce qu'ils ont vécu de similaire dans d'autres circonstances et dans d'autres milieux sociaux.

Jean Blache

Publié dans DOSSIER LA PAIX

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